Page d’histoire : Connaissez-vous la pire catastrophe naturelle survenue en France et qui a tué 28 000 personnes en moins de 2 minutes ? La Rédaction 7 vous raconte tout.
Le passage du cyclone Chido à Mayotte le 14 décembre 2024 pourrait être perçue comme l'une des pires catastrophes naturelles depuis le début du XXe siècle en France. Mais, tenez-vous bien, celle qui détient ce triste record a eu lieu le 8 mai 1902, après l'éruption volcanique de la montagne Pelée en Martinique. 28 000 personnes ont péri en moins de deux minutes. Saint-Pierre, alors plus grande ville du département d'outre-mer, fut rayée de la carte après l'éruption de la montagne Pelée. La quasi-totalité de ses habitants furent tués, soit 1/5 de la population de l'île. Seuls trois rescapés ont été certifiés.
Martinique, 8 mai 1902 : l’éruption de la Montagne Pelée détruit Saint-Pierre
Le 8 mai 1902 la ville de Saint-Pierre, à la Martinique, dans les Antilles françaises, est rayée de la carte. La nuée ardente créée par une éruption de la montagne Pelée détruit complètement ce qui est alors la ville la plus importante de l’île. Plus de 30 000 personnes sont tuées en quelques minutes, un cinquième de la population martiniquaise de l’époque. C’est l’un des bilans humains les plus lourds de l’histoire mondiale des éruptions volcaniques et l’une des catastrophes naturelles les plus importantes de l’histoire de France.
LES HABITANTS IGNORAIENT QU’ILS VIVAIENT SUR UNE VÉRITABLE BOMBE À RETARDEMENT
L’éruption soudaine de la montagne Pelée le 8 mai 1902, qui a réduit en cendres la ville de Saint-Pierre en quelques minutes, a marqué un tournant dans l’étude des volcans.
La montagne Pelée, en Martinique, a non seulement donné son nom à un type de volcans – le type péléen, hautement explosif – mais elle a également marqué de manière significative l’histoire volcanologique : l’éruption cataclysmique de 1902 a entraîné la destruction totale de la ville de Saint-Pierre.
Après une éruption modérée en 1851, ce volcan gris actif était considéré comme présentant un risque éruptif relativement faible. Le 23 avril 1902 pourtant, une éruption volcanique majeure, la plus meurtrière du 20e siècle, commença sous terre. Elle secoua l’île française quelques jours plus tard, pour se poursuivre jusqu’au 5 octobre 1905. Cette activité soudaine, d’une puissance inattendue, fut dévastatrice : « la structure interne du volcan était instable en raison de la présence de poches de magma sous pression », explique Jacques-Marie Bardintzeff, volcanologue à l’université de Paris-Saclay.
Les habitants ignoraient qu’ils vivaient sur une véritable bombe à retardement depuis plusieurs jours : du magma en fusion se trouvait à quelques kilomètres sous leurs pieds. « Juste avant l’éruption, le magma est monté rapidement, entraînant l’augmentation de la pression puis l’explosion du somment de la montagne. Cette éruption très spécifique appelée nuée ardente, ou écoulement pyroclastique, est redoutable », précise le volcanologue. « Elle provoque un nuage brûlant composé de gaz, de roches, de cendres et de magma qui déferle sur le flanc du volcan à des vitesses atteignant plusieurs centaines de kilomètres par heure et des températures de plusieurs centaines de degrés ».
SAINT-PIERRE, LA PERLE DES ANTILLES
Au début du 20e siècle, Saint-Pierre est la ville la plus peuplée de Martinique. Prospère et moderne, elle en est la capitale économique et est surnommée tantôt La perle des Antilles, tantôt Le petit Paris. Avec ses rues pavées, ses maisons colorées, son théâtre, et son remarquable jardin botanique – considéré comme le plus beau de toutes les Antilles – Saint-Pierre est une ville moderne, dotée d’un système de canalisations et d’un réseau électrique offrant des infrastructures et des équipements très appréciés des Pierrotins. La ville est par ailleurs le principal port marchand de l’île, et ses activités commerciales liées à la production sucrière ont largement contribué à son développement.
Le 8 mai 1902, une journée sèche et sans pluie s’annonçait. C’était la fin de la récolte sucrière et les navires chargés de sucre et de rhum s’apprêtaient à quitter la rade pour rejoindre les ports de Saint-Nazaire et de Bordeaux en métropole.
Quelques semaines avant le drame, la montagne Pelée, caractérisée par un dôme de lave à son sommet formé lors des éruptions antérieures, avait présenté des signes d’une nouvelle activité sous forme de secousses telluriques, de fumerolles et de lueurs bien visibles dans la nuit qui commençait à inquiéter les habitants. Cependant, en raison d’un désaccord entre les scientifiques de l’époque sur l’évaluation du danger, la population ne fut pas avertie.
Dès le 23 avril, la montagne présenta des signes clairs de réveil à travers un nuage de cendres. Le 24 avril, une première colonne noire s’éleva jusqu’à 600 m de haut, et dès le lendemain, un manteau de cendres recouvrit la commune du Prêcheur, située à dix kilomètres de Saint-Pierre. Le 28 avril, des tremblements de terre se firent sentir, les câbles sous-marins rompirent, et les sources se tarirent. Bien que l’ordre d’urgence ait été déclaré, quelques jours plus tard, personne ne songeait à partir. Le premier tour des élections législatives avait même eu lieu la veille, avec un taux de participation de 86 %.
Le rapport Lascroux de 1902, La Martinique avant et après le désastre du 8 mai 1902, retrace la chronologie des événements : « le 3 mai la montagne Pelée est éclairée la nuit par la lave incandescente qui remplit son cratère » ; « le 4 mai elle couvre les environs de cendres » ; « le 5 mai la mer recule de 90 mètres, un jet de boue engloutit une sucrerie… », entraînant la mort de trente-six personnes.
Après l’ensevelissement de l’usine Guérin par le débordement de la rivière Blanche, l’activité volcanique de la montagne Pelée se poursuivit les jours suivants, sans que quiconque ne prenne pleinement conscience de la catastrophe imminente. « Il y avait eu un précédent », rappelle Jacques-Marie Bardintzeff, faisant référence à l’éruption sans conséquence de la montagne Pelée en 1851. Les plus anciens supposèrent qu’il ne se passerait rien de plus. Le journal local Les Antilles s’en amusa même en titrant dans son édition du 30 avril, « la montagne Pelée vient nous faire manger un poisson d’avril ».
Le matin du 8 mai, deux minutes après huit heures, la nuée ardente s’abattit sur Saint-Pierre. Rien ne résista à la déferlante qui, en quelques instants, laissa place à un champ de ruines fumantes, sans âme qui vive. La position géographique de la ville, construite en amphithéâtre et surplombée par la montagne, a probablement contribué à faire de cette éruption l’une des plus grandes catastrophes naturelles du 20e siècle. « Les personnes se trouvant sur la trajectoire de la nuée ardente n’avaient aucune échappatoire, aucune chance de survie », déplore Jacques-Marie Bardintzeff.
Les nombreuses distilleries entourant la ville explosèrent, achevant de précipiter Saint-Pierre sous les cendres volcaniques de la montagne Pelée. La ville fut totalement ensevelie sous une couche de boue et de lave, se transformant en un vaste cimetière.
L’ESCALADE
Dès le soir du 8 mai, selon le rapport Lascroux, un télégramme du commandant du Suchet à Fort-de-France, fut adressé au ministre des colonies : « Reviens de Saint-Pierre. Ville complètement détruite par masse de feu… Suppose toute population anéantie. Ai ramené une trentaine de survivants. Tous navires sur rade incendiés et perdus… ».
Le ministre des colonies lança alors un appel afin d’obtenir des informations et de l’aide. Un nouveau télégramme en provenance de Sainte-Lucie rapporte que le Roddam arriva avec à son bord trente-cinq rescapés, tel une épave fantôme avec ses bâches et ses voiles calcinées, sans son ancre et ses chaînes jetées dans les eaux bouillantes pour s’échapper plus rapidement, signe de la précipitation avec laquelle le navire avait dû quitter le port de Saint-Pierre.
Le samedi 10 mai, à onze heures du matin, le gouverneur de la Guadeloupe annonça : « Le Suchet vient d’arriver de Martinique, venu chercher des vivres et il y repartira ce soir. » À son retour à Saint-Pierre le Suchet transmit une nouvelle dépêche : « Toute la ville en feu. L’éruption continue. Pluie de feu et de roches. Impossible de pénétrer dans la ville. Pas aperçu êtres vivants. Nombreux cadavres sur les quais… ».
Le capitaine du Roddam rapporta plus tard qu’après avoir affronté une terrible tempête dans la nuit du 7 au 8 mai, il s’ancra à une bouée dans la rade en face de Saint-Pierre. Soudain, à huit heures du matin, il observa une large nappe de fumée s’abattre sur la ville et sur le port, parsemée de scories incandescentes. En quelques secondes Saint-Pierre disparut sous ses yeux, avalée par les flammes et les cendres. Juste avant de fuir, il parvint à sauver les personnes se trouvant sur une chaloupe juste avant que celle-ci ne coule à pic.
La Rédaction 7 avec Nadège Lucas, National Geographic et Ouest-France
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